Où es-tu maintenant ?
Où es-tu maintenant ? Les châtaigniers s'ouvrent. Dans cette demeure, le petit jour, Attend le café, puis le baiser, brûlant.
Où es-tu maintenant ? L'automne fait son apparition Sur les chemins. Nous pleurons. Le jardin toujours attend.
Où es-tu maintenant ? Dans les sanglots, les souvenirs, L'odeur du bois et ton sourire. Aujourd'hui, je redeviens enfant.
Où es-tu maintenant ? Tes mains usées, le son du merle, Sous les larmes qui pleurent. Personne ne combat le temps.
Où es-tu maintenant ? La télé n'hurle plus. On dirait qu'elle sommeille, qu'elle s'est tue Lorsque tout est devenu blanc.
Où es-tu maintenant ? Le journal reste sur la chaise, Les chaussons là, doux malaise, Et je me plante ici. Je comprends.
* * *
Les châtaigniers au marron gourmand, L' odeur du café très tôt au matin, Les bisous arrachés, le regard malin. J'étais enfant. Tu étais grand. Le rouge, l'or, le vert et l'orange, La rivière en bas du jardin, monument A tes yeux, à tes mains, au printemps. Tout était si simple. Tu étais ange. Chaque meuble t'allait si bien , Comme chaque branche au fond du bois, Chaque champignon si frais de toi. Tu étais éternel. Nous étions gamins. Et les oiseaux, du merle au geai, Les mésanges en hiver sur la terrasse. Le temps tu sais rien n'efface, J' étais ignorante, petite. Tu riais. Le bruit, la cuisine, les humeurs, Les clés perdues au gré des poches, Des pantalons de velours et des sacoches. J' étais attentive. Tu guettais l'heure. Le fauteuil vide, le poids des secondes, De la maison étourdie de silence Quand l'hiver n'aura pas cette chance. J'étais bout de toi. Tu étais monde.
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Où es-tu maintenant ? Dans une poche ? Dans l’automne blond ? Dans les parfums du jardin, des marrons? Mon grand-père, ma tendresse d'enfant.
A mon grand-père, Jean Boussaroque.